Mikado tend le bâton pour se faire battre
7 janvier 2018
En janvier 2015, Mikado surprend le web et enflamme la twittosphère en annonçant le lancement d’un nouveau produit : Mikado Stick, un biscuit Mikado sans chocolat ! Retour sur un faux BadBuzz enrobé d’humour et d’autodérision.
A l’origine, une problématique produit
Tout commence en septembre 2014. Mikado, qui avait lancé une année plus tôt le Mikado King Choco avec deux fois plus de chocolat, est déçue des performances de ce nouveau produit. Le format manque de visibilité et les ventes ne suivent pas. La marque retient la proposition de l’agence Romance du groupe Omnicom, de rendre conscient le vrai en prêchant le faux : mettre en valeur l’avantage produit de ce Mikado double chocolat, en présentant sa disparition comme une innovation, à travers un produit imaginaire, le Mikado Stick.
Un BadBuzz orchestré à la baguette mais sans chocolat
Le 14 janvier, l’opération commence, d’abord par le compte Twitter de la marque qui annonce : « Voici le petit nouveau de la gamme : #MikadoStick ! » associé à une fausse publicité Mikado, sur laquelle on pouvait lire « Mikado Stick, 0% chocolat, 100% plaisir ».
Les réactions des fans sont immédiates :
« C’est plus Milkado sans chocolat… » @manolette38
« Ptdrrrrr Vendez des bouts de bois aussi » @CodEagle59210
Le community manager de la marque n’hésite pas à attiser le « bashing » en affichant une image d’un dinosaure se posant la question « Si un Mikado sans chocolat, c’est pas un Mikado, est-ce que du chocolat sans Mikado, c’est toujours du chocolat ? ». Plus inattendu, Fun Radio prends le pas en lançant le hashtag moqueur « Le Mikado sans Chocolat c’est aussi con que », entraînant plus de 8000 réactions, dont des marques tel que Chamallows :
#LeMikadoSansChocolatCestAussiConQue…
« un chameau sans bosses :’) » @LuudivineSimon
« une télé sans images… » @jnnrgirl
« une boite de nuit sans musique » @NadgeRivard
« un chocolat chaud sans Chamallows ! » @ChamallowsFR
Mikado entretien le buzz avec une page sur le site de la marque et en diffusant l’opération sur de nombreux supports : articles de blog, affichage dans le métro, vidéos sur Youtube, posts Facebook… Le contenu de marque diffusé en temps réel sur les réseaux sociaux était en partie préparé d’avance, le reste étant improvisé au sein d’une « social room » mise en place par l’agence, réunissant huit personnes pendant quatre jours. Certains blogs et journaux prenant l’information au sérieux la diffusent également, si bien que l’audience organique de l’opération sur ces quatre jours a été estimée à 3 millions de personnes. Le taux d’engagement sur les réseaux de la marque a pour sa part augmenté de 300%.
Une opération en cohérence avec la marque
Le BadBuzz, même lancé volontairement par une marque, présente plusieurs risques :
– Entacher, parfois durablement l’image de marque
– Susciter de la déception, voire de la colère
– Manquer de visibilité au moment de la révélation
Mikado a cependant évité ces écueils, pour des raisons liées à son image et à son identité. Premièrement, le chocolat est si étroitement lié à Mikado qu’il serait certainement au beau milieu du noyau central de la marque, juste à côté de « bâton » et « biscuit ». En jouant avec cet élément, la marque suscite donc des réactions, mais s’assure en même temps que la révélation sera acceptée comme une évidence. Il s’agit donc d’un véritable canular, auquel la seule réaction possible est « Comment ai-je pu y croire ? ». Par ailleurs, l’humour et la dérision font partie de la personnalité de la marque, qui s’adresse toujours à ses clients sur le ton de la connivence et est habituée à jouer avec eux de manière intelligente. Ce faux BadBuzz apparu comme une véritable rupture de la part de Mikado était donc en parfaite adéquation avec la marque, ce qui en explique certainement en partie le succès.
Julien Quedeville et Régis Aberbache
Master Marketing et pratiques commerciales, Formation continue, 2015/2016
IAE de Paris, Université Paris 1, Panthéon-Sorbonne