Quand le corps devient support de la Marque


31 août 2018, Russie. Une célèbre enseigne de pizza lance une offre promotionnelle détonante. Le principe ? Offrir 10.000 pizzas à tous les gourmands qui se feraient tatouer son logo. Malgré une stratégie bien rodée, l’entreprise a rapidement été prise de court par l’important nombre de participants à ce défi, comme en témoigne la vague de photos postées sur les réseaux sociaux.

Cette offre pose la question de l’usage du corps dans la publicité et nous invite à nous informer sur le rôle des tatouages dans la société de consommation.

L’ORIGINE DU TATTOO-MARKETING

Qu’ils soient noirs ou colorés, les tatouages sont le reflet d’une liberté d’expression qui vise souvent à affirmer sa personnalité. Ils peuvent évoquer une histoire passée, un combat remporté ou même… un logo. C’est aux États-Unis durant les années 2000 que nous avons vu apparaître le tattoo-marketing. Les marques rémunèrent les individus en échange d’un tatouage. La peau devient un nouveau support de marque et le corps, unique et personnel, se transforme en écran médiatisé. Marquée à vie, la personne tatouée devient un réel ambassadeur.

Bernard Hopkins était un sportif comme les autres lorsqu’il devient le premier homme à se faire tatouer un logo, celui du site de jeu Golden Palace, en contrepartie de 100.000$.

Le tattoo-marketing pose de nombreuses questions d’éthique, les entreprises étant prêtes à payer pour que des personnes utilisent leurs corps comme espaces publicitaires. Néanmoins, chaque individu est libre de ses décisions et de l’usage de son corps. Fréquemment, un tatouage de logo n’est pas uniquement la résultante d’une rémunération mais surtout le fruit d’un attachement à la marque ou aux valeurs qu’elle incarne.

UN EFFET DE MODE QUI PREND DE L’AMPLEUR

Le tattoo-marketing a peu à peu initié une mode. De fait, ils sont de plus en plus de consommateurs à sauter le pas et à se faire tatouer les logos de marques auxquelles ils s’identifient, sans aucune contrepartie financière.

Témoignage de Maxime MONTEIL – Étudiant

“Cet été, j’ai décidé de me faire tatouer une bouteille Alexandrion car nous partageons des valeurs communes : le voyage et l’aventure. Je me suis identifié à l’image véhiculée par cette marque et me la suis appropriée à travers ce tatouage.”

Pour Harley-Davidson, Apple ou encore McDonald’s, qui font partie des logos les plus tatoués, cette tendance offre une belle opportunité. Ces entreprises jouissent ainsi d’une publicité gratuite grâce aux clients les plus fidèles. A noter cependant que ces « publicités vivantes » ne sont pas contrôlables. En effet, les marques ne choisissent plus leurs égéries mais il s’agit de mouvements de liberté de personnes incarnant ou non l’image que la marque souhaiterait refléter.

Enfin, l’image que renvoie un logo n’est pas immuable. Qu’advient-il en cas de scandale lié à une marque ? La déception peut être grande pour les tatoués si la marque en question disparaît ou si son image est dégradée suite à un bad buzz.

LES AISSELLES COMME SUPPORT PUBLICITAIRE

La société Golden Palace n’est pas la seule à innover en termes de support de marque. Au Japon, Wakino Ad Company est à l’origine d’une nouvelle idée farfelue : payer les individus qui accepteraient de se coller des stickers publicitaires sous les aisselles et louer cette partie comme espace publicitaire. Cette campagne marketing est prévue pour être saisonnière : uniquement l’été afin d’être visible dans le métro lorsque les porteurs de stickers lèvent le bras pour se tenir.

L’agence espère ainsi attirer l’attention des prospects en sortant du lot… ce qui est assez ambitieux lorsque l’on sait qu’un citoyen lambda est quotidiennement exposé à plus de 3.000 messages publicitaires !

Initialement, le tatouage résulte d’un acte totalement libre et volontaire qui permet de s’exprimer librement en utilisant son corps comme support. Il s’agit d’une décision strictement personnelle. Cependant, dans le cas des tatouages utilisés comme moyens de communication à des fins publicitaires, choisis et rémunérés par les entreprises, cela pose plusieurs questions d’éthique. Jusqu’où iront les marques pour multiplier les zones de contact avec leurs prospects ?

 

Maxime MONTEIL
Emilie ROUSSET
Manon BRIERE
Camille d’AGOSTINO
Marie GARRIGUES

 Etudiants du M2 Marketing et Pratiques Commerciales de l’IAE de Paris (2017/2019)